Fines bulles

Le Prince de la nuit (1994)

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Le prince de la nuit

Le Prince de la nuit raconte la quête à travers les âges des différents membres d’une famille contre un vampire sanguinaire.

Cette excellente série, écrite et scénarisée par Yves Swolfs, revisite le mythe du vampire sous un jour nouveau. Au bout de 12 albums Durango, l’auteur éprouvait l’envie de raconter quelque chose plus en harmonie avec son évolution personnelle, marquée par une expérience de la psychanalyse. Si le vengeur solitaire était le produit de son enfance et de son adolescence, « Le Prince de La Nuit » s’inscrit dans une dynamique du passage à l’âge adulte.
Au delà d’être une formidable aventure, la série réalise le tour de force de respecter les codes du genre tout en rénovant complètement les bases du concept. L’introspection et l’étude des dualités individuelles l’emportent sur l’approche religieuse traditionnelle. Le graphisme atteint une maîtrise étonnante, proche de la gravure.

Kergan et ses adversaires sont les deux faces d’une seule et même médaille. Une seule âme exprime toutes ses contradictions à travers plusieurs personnages. Kergan est le reflet de ce que les « Chasseurs » enfouissent au plus profond d’eux même. Il cristallise cette face sombre, ces désirs de pouvoir refoulés contre laquelle ils doivent lutter.
Dans ses entretiens à Henri Philipini, Swolfs avoue volontiers que chaque chasseur est choisi malgré lui. Il est sacrifié par sa famille sur l’autel d’un devoir absurde. Ce rôle incombe bien souvent à l’aîné, en première ligne du transfert des espoirs et des angoisses de ses parents.
Afin de permettre à l’esprit de Jehan, première victime du vampire, de se réincarner à travers les siècles, les Rougemont doivent continuer la lutte. Ils se transmettent pour cela un coffret rempli d’information. Ce fardeau héréditaire possède une haute valeur symbolique. Il contient les atavismes inconscient de culpabilité subies générations après générations.
Au fil des années le coffret s’alourdi à mesure que la face sombre, l’adversaire se renforce. Il est très difficile d’échapper à soi même. La seule issue consiste en l’acceptation de cette part d’ombre qui permettra à l’individu de renaitre autrement. A ce propos, les chasseurs sont souvent des êtres bien peu recommandables, à l’image d’Armand ou d’Aymar qui ont plus de sang sur les mains que Kergan ne pourrait en avaler en un siècle. Ceci complique considérablement leur tache et la mécanique de lutte contre le mal frise le cercle vicieux. Quant à Jehan, seigneur arrogant et premier chasseur, sa lutte possède une corrélation directe avec la culpabilité d’avoir laissé mourir une femme qui lui refusait son amour.
Le choix des années 30 comme période de l’affrontement final entre Vincent et Kergan n’est pas anodin. L’Allemagne se trouve alors confrontée à la montée du mal ultime au coeur duquel le personnage du Vampire trouve toute sa place. Soumis à des choix lourds les individus se révèlent et ne peuvent plus fuir.
Jusqu’au dernier moment, Swolf ne savait pas comment s’achèverai sa série. Il se laisserait guider par son état d’esprit du moment.
A cet égard nous pouvons souhaiter qu’Yves Swolf reprenne un jour cette série dont le dénouement laisse présager le plus passionnant pour la suite.

Le Prince de la Nuit – Yves Swolfs – Editions Glénat

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